Incertitudes sur le procès de l’attentat de Nice

Les juges antiterroristes vont devoir décider si les huit suspects mis en examen dans l’attentat du 14 juillet 2016 avaient connaissance d’un projet terroriste, et éventuellement s’ils ont aidé l’auteur à le mettre en œuvre.

Nice, le 14 juillet 2016. En fonçant dans la foule avec son camion sur la Promenade des Anglais, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel avait tué 86 personnes et blessé 458 autres. AFP/VALERY HACHE

L’attentat de Nice fera-t-il l’objet d’un procès pour terrorisme ? La question paraît surprenante au regard du nombre de victimes - 86 morts et 458 blessés - et du mode opératoire - un camion projeté sur la foule le 14 juillet 2016. Et pourtant le débat existe. Le 30 avril, les juges antiterroristes ont notifié aux parties la fin des investigations. Ils vont devoir décider si les huit suspects mis en examen avaient connaissance d’un projet terroriste et éventuellement s’ils ont aidé l’auteur, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, à le mettre en œuvre.

Si oui, le procès se tiendra devant la cour d’assises spéciale. Mais si les charges terroristes sont jugées trop faibles, les magistrats pourraient se déclarer incompétents. Et l’affaire pourrait terminer devant le tribunal correctionnel de Nice avec des délits de droit commun. L’analyse s’avère ardue en raison de la mort du tueur et de sa personnalité complexe. L’instruction a brossé un portrait contradictoire de ce Franco-tunisien de 31 ans : d’un côté, Lahouiaej-Bouhlel avait montré des signes d’intérêt récents pour l’islam radical sur Internet, accréditant la thèse d’une radicalisation rapide. De l’autre, des témoins décrivent un homme instable, peu religieux et fasciné par la violence sadique et morbide. On lui prête de nombreuses conquêtes, femmes comme hommes, une obsession pour le sexe et les soirées alcoolisées. Aucun lien avec Daech n’a été découvert.

« La solidité des charges doit se discuter devant la cour d’assises »
En l’absence de mobile clair, l’instruction a peiné à relier les huit suspects à une entreprise terroriste. Tous disent ignorer qu’un attentat se tramait. Avocats d’un homme soupçonné d’avoir fourni une arme, Mes Karim Laouafi et Frédéric Nasrinfar insistent : « Il faut que les juges restituent aux faits leur vraie qualification. Notre client est depuis trop longtemps incarcéré pour des faits terroristes alors qu’il n’a rien à voir avec l’islam radical. C’est le cas pour la majorité des mis en examen. »

« Un procès en correctionnelle serait vécu de façon dramatique par les victimes, rappelle, de son côté, Me Gérard Chemla, avocat de parties civiles. La solidité des charges doit se discuter devant la cour d’assises. »

Publié par J.P.-L. pour le Parisien, le 24 mai 2020.

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