PROCES DU DRAME DE MILLAS : TOUT SAVOIR SUR L’ACCIDENT DE CAR SCOLAIRE QUI A CAUSE LA MORT DE 6 COLLEGIENS

DRAME Lundi, à Marseille, s’ouvre le procès de la conductrice dont le car a percuté un TER à Millas (Pyrénées-Orientales), le 14 décembre 2017, causant la mort de six collégiens.

  • Le 14 décembre 2017, un bus scolaire et un TER entraient en collision, à un passage à niveau, à Millas, près de Perpignan, causant la mort de six collégiens.
  • A partir de lundi, comparaît à Marseille la conductrice du car, qui assure, depuis ses premières auditions, que les barrières du passage à niveau étaient ouvertes.
  • Ce procès, hors norme, compte 123 parties civiles, il est très attendu par les familles des enfants présents dans le car scolaire.

Le 14 décembre 2017, un effroyable accident ébranlait la petite commune de Millas, près de Perpignan (Pyrénées-Orientales). Une collision entre un train TER et un car scolaire tuait six collégiens, et en blessait dix-sept autres, à la hauteur d’un passage à niveau. Tandis que s’ouvre lundi à Marseille (Bouches-du-Rhône) la comparution de la conductrice, 20 Minutes vous donne les clés pour comprendre le procès.

Que s’est-il passé ?

Le 14 décembre 2017, il est un peu plus de 16 heures quand une brutale collision survient à un passage à niveau, particulièrement redouté par les habitants, à Millas. Un TER, reliant Perpignan à Villefranche-de-Conflent, a violemment percuté un car scolaire, qui ramenait une vingtaine d’enfants à leurs domiciles, dans des villages du coin. Le véhicule a été coupé en deux dans l’accident, tant le choc a été violent. Six collégiens perdront la vie, et dix-sept autres seront blessés, avec des ITT allant de 2 à 180 jours.

Que dit la conductrice du bus ?

Dès ses premières auditions, la conductrice, qui sera jugée à Marseille pour les « homicides involontaires » de six collégiens, et pour les blessures involontaires de huit autres, a assuré que les barrières étaient ouvertes, quand son car s’approchait du passage à niveau. « Elle n’aurait jamais franchi une barrière baissée », assurait en février dernier, à l’annonce de son renvoi devant le tribunal correctionnel, son avocat, Jean Codognès, qui n’a pas donné suite aux sollicitations de 20 Minutes. En mai 2019, dans un rapport du Bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT), la prévenue affirmait « ne pas avoir vu de barrière », ni « ressenti aucun impact », avec son véhicule. C’est là, la clé du procès : les barrières étaient-elles ouvertes, ou fermées ?

La SNCF, de son côté, a toujours assuré que le passage à niveau fonctionnait parfaitement. Selon les enquêteurs, la conductrice aurait forcé « la demi-barrière fermée dudit passage à niveau alors qu’un train express régional arrivait ». « La cause directe de cet accident est le non-arrêt de l’autocar au passage à niveau malgré les feux rouges clignotants et la barrière qui l’imposaient », lit-on, dans le rapport du BEA-TT, qui estimait toutefois que « la conductrice du car n’avait pas perçu que le passage à niveau se fermait en raison notamment d’une configuration défavorable des lieux ». L’état psychologique de la prévenue devrait être également au cœur des débats. Le fait qu’elle prenait des médicaments, lors de l’accident, a également été soulevé lors de l’enquête.

Qu’attendent les familles des victimes ?

L’instruction a été longue. Cela fait quatre ans et demi que les familles des victimes attendent, fébrilement, ce procès. « Ce fut très, très long, pour elles », confie à 20 Minutes Corine Serfati-Chetrit, avocate de familles de collégiens tués dans l’accident. « Elles n’ont pas fait leur deuil. Elles ne sont pas arrivées à avancer. Elles sont figées sur ce drame. » Ces familles espèrent qu’il y aura « une officialisation de la situation, que la vérité judiciaire sera établie ». « Après le 7 octobre [le dernier jour du procès], elles pourront tourner une page. Parce que tant que la procédure judiciaire est en cours, on en reparle, forcément. »

Les familles « attendent que les responsabilités soient, enfin, établies, explique de son côté sa consœur Vanessa Brandone, avocate, elle aussi, de familles d’enfants décédés. Même si en ce qui concerne mes parties civiles, elles n’ont aucun doute sur la responsabilité de la conductrice du car. Elles souhaitent qu’« enfin », la lumière soit faite sur cet accident. » Pour, poursuit l’avocate, « pouvoir passer à autre chose ».

Comment ce procès gigantesque va-t-il se passer ?

Ce procès a été labellisé « procès hors norme » par le ministère de la Justice. Et, en effet, à bien des égards, il l’est. Il y a d’abord le nombre de parties civiles recensées à cette heure : pas moins de 123. Un nombre qui pourrait être amené à augmenter, à en croire le parquet de Marseille, puisque de nouvelles demandes de constitution de parties civiles lui sont parvenues. Au terme de quatre ans d’enquête, et de plusieurs dizaines de tonnes de procédures, la 6e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Marseille tentera de faire la lumière sur cette affaire tentaculaire pendant près de trois semaines. C’est en effet cette juridiction qui est spécialisée en matière d’accident collectif, et a nécessité la délocalisation du procès dans la salle des procès hors normes de la Caserne du Muy, récemment construite dans le centre-ville de la cité phocéenne. Six vacataires ont été recrutés spécialement pour l’occasion. Trois d’entre eux seront affectés à l’enregistrement des parties civiles, un à l’audiencement et à la reprographie, un autre au traitement des indemnisations et un dernier à la manipulation de la caméra au sein de la salle.

En effet, en parallèle, le procès sera retransmis dans une salle de 200 places louée spécialement à cet effet dans le Palais des congrès de Perpignan. « La complexité de cette affaire, c’est de réussir à la compétence de la juridiction marseillaise en matière d’accident collectif avec la nécessité d’une justice de proximité. »

Quel accompagnement pour les victimes ?

Deux associations, Aide Victimes Actes Délinquants (Avad), à Marseille, et France Victimes 66, à Perpignan, travaillent depuis plusieurs mois à l’accompagnement des victimes et autres parties civiles. « Nous avons d’abord travaillé en amont du procès, indique la directrice de l’Avad à Marseille, Marie Guillaume, à travers la circulation d’un questionnaire au cours du mois de mars transmis par les avocats des parties civiles pour avoir leurs intentions. Nous demandions par exemple si elles souhaitaient assister au procès à Marseille, et à quelle fréquence. Nous avons eu une cinquantaine de réponses ce qui permet d’avoir une certaine tendance et du coup d’ajuster le dispositif mis en place. Suite à ce questionnaire, nous avons établi des contacts avec certaines parties civiles. » Des appels téléphoniques avec les familles de victimes se sont en effet multipliés depuis le mois dernier, afin de les informer sur l’organisation du procès, les aider pour leurs déplacements ou les renseigner sur les questions d’indemnisations.

Pendant le procès, un à deux psychologues et un à deux juristes seront en permanence à disposition des parties civiles à Marseille. Tout a été pensé pour faciliter leur venue, du partenariat avec un restaurant administratif interministériel proche, pour manger rapidement et à moindre coût, au parking d’habitude alloué au ministère des Armées pour faciliter le stationnement. Sans oublier le guide adressé aux parties civiles qui comprend plans, listes d’hôtels et autres renseignements indispensables à leur venue. Des chiens dressés pour faciliter la parole des victimes seront par ailleurs présents certains jours.

Crédit photos : Article de Mathilde Ceilles et Nicolas Bonzom pour 20 Minutes publié le 18/09/2022

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